Molson Coors abandonne ses politiques de «diversité, d’équité et d’inclusion»
MONTRÉAL — La brasserie Molson Coors abandonne ses politiques de «diversité-équité-inclusion» pour adopter une «vision plus large», qui stipule que tous les employés sont les bienvenus dans l’entreprise. Mais les groupes représentant les communautés LGBTQ+ y voient un recul.
Dans une note interne que Molson Coors a partagée avec La Presse Canadienne, l’entreprise nord-américaine annonce que la formation de ses employés en matière de diversité, d’équité et d’inclusion est terminée et qu’elle n’aura plus d’«objectifs de représentation» spécifiques dans son processus d’embauche.
De plus, la multinationale canado-américaine a déclaré qu’elle ne participerait plus au programme de classement de la «Human Rights Campaign», un organisme de défense qui évalue les entreprises en fonction de l’inclusion de leurs pratiques en milieu de travail envers la communauté LGBTQ+.
«À l’avenir, nous évaluerons notre travail pour bâtir une culture d’entreprise solide en fonction de nos propres mesures internes, de vos commentaires et de notre succès à servir nos clients», peut-on lire dans la note aux employés.
Molson Coors annonce qu’elle n’exigera plus de ses fournisseurs qu’ils atteignent des objectifs de diversité. De telles mesures, précise la note, «peuvent être compliquées et influencées par des facteurs indépendants de notre volonté».
La note fait également référence aux tensions sociales et politiques actuelles: «dans le monde polarisé dans lequel nous vivons, veillons à rester unis en tant qu’équipe».
L’entreprise n’a mis personne à disposition pour une entrevue vendredi.
Dans un courriel, Human Rights Campaign, qui avait précédemment attribué une note parfaite à Molson Coors, n’a pas directement reconnu le changement au sein de la brasserie. Mais cet organisme souligne que certains chefs d’entreprise tournent le dos à leurs engagements en matière d’inclusion afin de céder aux pressions de consommateurs et de groupes.
Mais Orlando Gonzales, vice-président principal de la recherche, de la formation et des programmes chez Human Rights Campaign, écrit sur le site Web de l’organisme: «Les entreprises comme Molson Coors, Ford et d’autres qui abandonnent leurs valeurs et reviennent sur leurs engagements en matière de diversité, d’équité et d’inclusion risquent de perdre à la fois le talent de leurs meilleurs employés et l’argent des consommateurs».
Un vent américain
Le changement de politique chez Molson Coors survient dans un contexte de réactions négatives contre des entreprises aux États-Unis qui semblent soutenir la communauté LGBTQ+ et adopter des programmes de diversité, d’équité et d’inclusion.
Au mois d’août, Jim Farley, PDG de Ford Motor, a envoyé une note à tous les employés expliquant la décision de cesser de participer aux sondages externes sur la culture d’entreprise et au sondage annuel de Human Rights Campaign.
En janvier, Chip Wilson, fondateur de Lululemon Athletica, dont le siège est à Vancouver, avait critiqué les efforts de son ancienne entreprise en matière de diversité. En 2023, Bud Light et Nike ont toutes deux été critiquées pour avoir établi un partenariat avec l’influenceuse trans Dylan Mulvaney et l’avoir soutenue.
Le changement de politique chez Molson Coors est un signe de recul pour Olivia Baker. En tant qu’intervenante à la Fondation Émergence, qui milite contre l’homophobie et la transphobie, Mme Baker visite des entreprises et des organisations partout au Canada pour les aider à mettre en œuvre les meilleures pratiques qui soutiennent la communauté LGBTQ+ en milieu de travail.
Elle s’est dite «déçue mais pas surprise» par la décision de Molson Coors, qu’elle qualifie de dernier exemple de «recrudescence de la haine envers les LGBTQ+». Elle affirme que Molson Coors fait face à une réaction violente contre les politiques d’inclusion, une grande partie du vitriol venant des États-Unis et prenant maintenant racine au Canada.
Human Rights Campaign croit que les entreprises qui renoncent à leurs initiatives en matière de DEI risquent de perdre des profits. Selon un sondage mené en août, jusqu’à 80 % des adultes LGBTQ+ interrogés à Washington ont déclaré qu’ils soutiendraient le boycottage d’une entreprise qui reviendrait sur ses politiques en matière de DEI.
Le syndicat des Teamsters Canada, qui représente 750 travailleurs de la brasserie, du transport et du service à la clientèle chez Molson à Montréal, affirme que l’entreprise est libre de mettre en œuvre ses propres politiques.
«Si nous déterminons que l’entreprise se livre à des pratiques discriminatoires, nous prendrons rapidement des mesures pour rectifier la situation», a indiqué le syndicat dans une déclaration écrite.