Travailleurs étrangers temporaires: les modifications à la loi inquiètent

EMPLOI. Les annonces gouvernementales récentes, telles que de réduire à 10 % le pourcentage des embauches autorisées pour les postes à bas salaire dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires, n’ont rien de rassurant pour les entreprises de la région. Différents acteurs locaux se sont réunis le lundi 7 octobre dernier à Sainte-Marie, afin d’exprimer leurs préoccupations.

Une étude a été réalisée dans les trois dernières années conjointement par Beauce-Centre Économique, le Conseil économique de Beauce et Développement économique Nouvelle-Beauce, auprès de 162 entreprises. De ce nombre, 106 recrutent à l’international. Ensemble, elles comptent 1 734 employés temporaires, dont 241 ont accueilli leur famille ici.

Aux dires d’Hélène Latulippe, directrice générale du Conseil économique de Beauce, environ la moitié des entreprises de la région pourraient être touchées par les baisses des quotas. « Les mesures nous font craindre le pire. […] Ce qu’on veut, c’est garder nos travailleurs étrangers temporaires », a-t-elle déclaré.

« Passer de 20 % à 10 %, c’est énorme. Ça entraîne une grande incertitude. […] Nous avons le taux de chômage le plus bas de la province (2,9 %), la ligne est mince. Ça risque de créer un déséquilibre. Je pense que des ajustements devraient être adoptés et que des mesures transitoires devraient être respectées », a lancé à son tour Gaétan Vachon, préfet de la MRC de La Nouvelle-Beauce et représentant de la Table stratégique en immigration de la Beauce. « Ça se ressent partout. Je ne comprends pas que les autres régions n’aient pas réagi, parce que c’est majeur. »

Inquiétudes similaires chez Rotobec 

Parmi les personnes présentes à la rencontre, Cathy Roberge, directrice des ressources humaines chez Rotobec de Sainte-Justine, s’est dite interpellée par cette initiative des groupes de développement économique de la Beauce et tenait donc à joindre sa voix à la leur. Son entreprise étant l’un des principaux employeurs de la région, elle estime que les mêmes points sont valables pour Les Etchemins.

Comme Rotobec compte 90 travailleurs étrangers temporaires sur 350, au total, il est à peu près inévitable que l’entreprise sera touchée, estime-t-elle. « Ça aura aussi des impacts chez nous. On doit renouveler des permis à l’heure actuelle et on ne connaît pas les impacts du 10 % sur cet aspect. Certains métiers considérés dans le processus simplifié sont exclus actuellement, sauf qu’ils envisagent de les inclure. »

Les salaires étant avantageux dans une entreprise comme Rotobec, cela pourrait possiblement permettre d’éviter d’être pénalisé, dans certains cas. « Les salaires sont un peu plus élevés que le salaire médiant chez nous, mais tous les salaires sont voués à être bonifiés de toute façon, puisque ça augmente annuellement. »

Selon elle, les gouvernements auraient avantage à mieux étudier la question et même considérer la région de Chaudière-Appalaches comme ayant ses particularités, comme l’ont suggéré certains intervenants présents à la rencontre. « Ils devraient venir sonder nos entreprises. Nous avons déjà diminué notre recrutement de travailleurs à l’étranger, justement parce qu’on sentait venir la baisse. Nous avons tout de même des départs de travailleurs et devrons composer avec. Il serait bien que l’on puisse choisir qui part et qui devrait rester, car il y a des postes-clés dans une entreprise et plusieurs de nos travailleurs étrangers sont très compétents. »

Le préfet de La Nouvelle-Beauce, Gaétan Vachon, demande simplement d’accorder des droits acquis aux travailleurs étrangers temporaires déjà en poste, de maintenir le taux d’embauche à 20 % pour certains secteurs essentiels, d’avoir un préavis suffisant avant de mettre en place la limite à 10 % (de même qu’un délai raisonnable par la suite), d’assouplir l’application des nouvelles règles pour les entreprises fortement dépendantes de cette main-d’œuvre et enfin, d’offrir une meilleure prévisibilité et une consultation plus étroite pour les acteurs locaux.

« Nous ne sommes pas contre une régulation, mais il faut qu’il y ait une bonne mise en place. Il y a une détresse qui s’installe », d’appuyer Martin Beaulieu, directeur général du CJE de Beauce-Sud, conscient des efforts investis non seulement par les employeurs, mais par toutes ces personnes dont l’unique désir est de s’intégrer.

Cathy Roberge estime que son entreprise fait tous les efforts pour s’assurer de leur intégration. « On a eu besoin de temps avant de recevoir de l’aide du milieu. Nous avons une belle collaboration avec des partenaires. On payait le professeur pour la francisation auparavant, maintenant il y a une école à Saint-Cyprien qui s’en occupe. Entretemps, le gouvernement ajoute toujours des règles qui viennent compliquer les choses, alors que nous, on préfère les choses simples. »

En collaboration avec Éric Gourde