Les partis savent que les jeunes ont peut-être la clé de la Maison-Blanche
WASHINGTON — Les jeunes qui votent pour la première fois aux États-Unis pourraient bien détenir la clé de la Maison-Blanche, et cela pourrait être à l’avantage de la candidate démocrate Kamela Harris.
On estime à environ huit millions de membres de la génération Z (ou Zoomers) qui pourraient voter pour la première fois au scrutin de mardi.
Marc Trussier, un professeur canadien de l’Université de Pennsylvanie, affirme que les sondages indiquent que les jeunes appuient beaucoup plus Mme Harris que son adversaire républicain Donald Trump dans un ratio d’environ 60-40.
Mais à l’instar de la population, il y a une grande division entre les jeunes femmes et les jeunes hommes. Ces derniers ont tendance à préférer l’ancien président à l’actuelle vice-présidente. «Les jeunes hommes sont plus partisans de Trump que les jeunes femmes», dit le Pr Tessier, qui croit que le vote sera quand même serré parmi cette catégorie d’électeurs.
Donald Trump a d’ailleurs adapté cette stratégie à cette réalité. Il a tenté de séduire le jeune électorat masculin en allant à des galas de lutte ou en participant à des balados orientés vers le sport. Il a aussi accepté d’être interviewé par Joe Rogan. Il semble avoir accru sa popularité auprès des jeunes Noirs et des jeunes hispanophones.
Le républicain veut convaincre les jeunes qui sont inquiets pour leur avenir et se disent préoccupés par les valeurs que la gauche chercherait prétendument à leur inculquer.
Ses rassemblements ont une ambiance de kermesse plus proche des spectacles de camions-monstres qu’une manifestation politique. M. Trump a aussi obtenu l’appui de certaines personnalités, comme Kid Rock, Hulk Hogan et certains rappeurs exerçant leur art dans les États clés.
Le Pr Trussler croit que M. Trump réussit à établir des liens avec ces premiers votants, mais aussi avec ceux qui ne s’intéressent habituellement pas à la politique et qui ne participent pas souvent au processus électoral.
«Les deux candidats ont adopté des stratégies qui n’auraient même pas été envisagées dans les élections précédentes», lance-t-il.
Kamela Harris courtise aussi le vote des jeunes. Elle a participé à des balados comme «Call Her Daddy» et obtenu l’appui de grandes vedettes comme Beyonce et Taylor Swift.
Des observateurs ont louangé la stratégie de l’équipe de Mme Harris sur les réseaux sociaux. Selon eux, elle aurait réussi à créer des moments viraux.
«Les équipes ont assigné des gens aux réseaux sociaux pour implanter ce genre de stratégie, dit Melissa Haussman, professeure émérite de l’Université Carleton, à Ottawa. Ces stratégies ne naissent pas spontanément.»
Les démocrates tentent de rejoindre là où ils sont, mentionne Carter Fay, une jeune électrice de la Géorgie qui étudie à l’Université de Toronto. Sa génération a grandi en regardant les plateformes comme TikTok ou Instagram. C’est sur ces réseaux qu’ils apprennent à militer.
«Le fait que ma génération a la possibilité d’aller voter, c’est vraiment quelque chose d’important», juge celle qui a déjà choisi les démocrates.
Les sondages laissent entendre que les jeunes se laissent influencer par leurs pairs. Ainsi, une étude de l’école d’administration publique de l’université Harvard indique que 79 % des jeunes prévoient aller voter si leurs amis le font. Ce taux chute à 35 % si leurs amis n’exercent pas leur droit de vote.
C’est là la clé, croit le Pr Trussier. Habituellement, les jeunes votent moins que les autres classes d’âge de l’électorat.
En 2020, environ 55 % des jeunes âgées de 18 à 29 ans avaient exercé leur droit de vote, une forte augmentation par rapport à l’élection précédente. Ils avaient joué un grand rôle dans la victoire de Joe Biden dans les États clés.
Les démocrates craignent une certaine apathie au sein de cette population. Plusieurs jeunes électeurs ne se sentaient pas concernés lorsque Joe Biden était le candidat démocrate. Son remplacement par Mme Harris les aura-t-il convaincus de retourner aux urnes ?
Et les jeunes républicains n’ont pas baissé les bras non plus. Comme le rappelle George Constantine, un jeune partisan de Donald Trump, eux aussi sont motivés et parlent à leurs amis.
«S’ils aiment Trump, ils ne suivent que Trump, déclare-t-il. Ils ne laissent pas leurs amis, leur école, l’Internet leur dire autrement. Ce que vous pensez, c’est ça qui vous convient le mieux.»