Nouvelle vocation pour l’usine Maple Leaf
SAINT-ANSELME. L’usine Maple Leaf de Saint-Anselme (anciennement la Charcuterie Roy), qui a fermé ses portes il y a deux ans et demi, sera relancée à compter du mois de mai, grâce à des intérêts bellechassois.
Depuis le 13 mars dernier, le bâtiment de 45 000 pieds carrés situé sur la rue Principale est la propriété de l’homme d’affaires Laurent Morin de Saint-Anselme de l’entreprise Phytimpact. La transaction, incluant les équipements s’y trouvant, a nécessité un investissement important, dont les détails seront annoncés sous peu.
Dès le mois de mai, l’entreprise se lancera dans la préparation de mets biologiques (soupes bio, sauces Vegan et jus de bleuets), avant d’ajouter la transformation de petits fruits nordiques (bleuets, camerises et autres) en poudres pour l’industrie nutraceutique (produits naturels) à l’automne.
Cela fait cinq ans que M. Morin travaille à la réalisation de ce projet, ses efforts s’étant intensifiés au cours des deux dernières années alors qu’il lançait les discussions visant à acquérir l’usine anselmoise.
« Cela fait presque deux ans que je négocie avec les gens de Maple Leaf pour faire l’acquisition du bâtiment. Ceux-ci ont été très collaborateurs et dès la fin février 2020, les banquiers et les autorités gouvernementales m’ont dit que je pouvais aller de l’avant avec la transaction. La pandémie est arrivée et tout a été repoussé d’un an », précise-t-il en ajoutant que son dossier a été rouvert en septembre, ce qui a permis un dénouement final au cours des derniers jours.
Un peu par accident
Spécialiste du marketing, Laurent Morin mentionne que l’histoire de Phytimpact, qui a été incorporée en 2012, puis l’acquisition de l’usine de Saint-Anselme, tout récemment, est survenue un peu par accident.
Déclaré diabétique de type-2 en 2012, M. Morin cherchait une façon de traiter sa maladie à l’aide de produits naturels. « Les médecins me disaient qu’il n’y avait que des molécules chimiques qui pouvaient permettre de bien gérer la glycémie, qu’aucun produit naturel ne permettait cela. À force de chercher, j’ai su qu’un chercheur avait fait des avancées sur un concept de jus de bleuets biofermenté, qui avait comme vertu de mieux contrôler le diabète. Je suis entré en contact avec lui et on a travaillé ensemble sur des produits de gestion de la glycémie. »
M. Morin a fait l’acquisition d’une bleuetière sur la Côte-Nord. Il possède actuellement 450 âcres de bleuets sauvages sur la Côte-Nord et n’exclut pas la possibilité d’acheter de nouvelles terres à cet endroit dans les prochaines années.
« Des analyses de laboratoire ont permis de noter que les bleuets situés au nord du 50e parallèle étaient 20 % plus riches en ingrédients actifs, dont les polyphénols, élément de la famille des antioxydants. C’est là que j’ai développé la marque de commerce BlüNordicity, puis que j’ai commencé à présenter ça dans de grandes expositions. Je commence à avoir de la production et le timing est bon avec l’achat de l’usine qui arrive en même temps », poursuit-il.
Soulignons que la phase 1 de développement de Phytimpact, comprenant l’incorporation, l’acquisition des terres à bleuets sauvages de la Côte-Nord, les projets de recherche et développement, la création d’un portfolio d’ingrédients ainsi que la commercialisation de celui-ci, a nécessité des investissements avoisinant 1,2 M$.
« Au cours des cinq dernières années, je suis allé dans de nombreuses expositions de produits santé au Canada, aux États-Unis et en Europe afin de voir ce qui s’y passait, de découvrir les clients et compétiteurs potentiels, ainsi que l’évolution du marché. Cela m’a aussi permis de me positionner, de me créer un réseau et d’obtenir mes premiers contrats », confirme M. Morin qui ajoute que l’acquisition de l’usine de Saint-Anselme était primordiale dans son plan d’affaires et la vente de ses produits à l’international.
« Comme je suis dans l’innovation et dans l’exportation, j’ai pu avoir accès à du financement gouvernemental, en plus de mes mises de fonds personnelles, pour développer mon projet », mentionne-t-il en ajoutant que de nouveaux investissements à l’usine de Saint-Anselme seront annoncés sous peu.
Les effets positifs de la COVID
La relance de l’usine de Saint-Anselme, avec l’introduction de mets biologiques et la transformation de petits fruits nordiques entrant dans la fabrication de produits naturels, arrive à point nommé pour Laurent Morin qui considère que la pandémie de COVID-19 a sensibilisé davantage la population vis-à-vis leur santé, l’importance de mieux s’alimenter et de faire attention à eux.
Cette tendance est confirmée par André Amyot, vice-président Opérations chez Kerry, qui soutient M. Morin dans ses démarches. M. Amyot et d’autres intervenants issus du domaine de l’agroalimentaire font partie d’un comité aviseur qui conseille l’homme d’affaires dans ses prises de décisions et le développement de son entreprise.
« Ce qui m’allume dans ce projet, c’est ce que Laurent et son équipe veulent faire avec les dérivés des produits nordiques. Il y a une place qui n’est pas très couverte au Canada pour des produits à valeur ajoutée comme ceux-ci et aux États-Unis, des produits offrant une valeur ajoutée sur le plan de l’alimentation, tout en étant bons au goût, ont la cote. Les Américains sont prêts à payer un peu plus cher pour de la nourriture qui peut avoir un impact pour la santé et ces produits offrent beaucoup de potentiel », indique-t-il en ajoutant qu’il se réjouissait de voir un tel projet voir le jour dans Bellechasse.
Place à l’innovation
Laurent Morin dit avoir travaillé avec de grands centres de recherche pour le développement de ses produits, que ce soit pour la gestion de la glycémie, les probiotiques ou autres. Sous les conseils du directeur général d’Ag-Bio Centre à Lévis, il a suivi une formation en biotechnologie à l’Université Laval.
Le CNRC (Conseil national de recherche scientifique) lui a ensuite offert une subvention qui lui a permis d’embaucher une scientifique avec laquelle il a développé différents produits qu’il a pu présenter dans différentes expositions en Europe et aux États-Unis. Soulignons d’ailleurs qu’en plus de son comité aviseur, il s’est entouré d’un comité de scientifiques qui l’appuient, encore aujourd’hui, dans l’élaboration de ses produits.
Imiter la famille Roy
Laurent Morin a profité de la visite de La Voix du Sud pour remettre à Mme Claudette Rodrigue-Roy, veuve du fondateur de la Charcuterie Roy, Raymond Roy, le cadre que l’entreprise bellechassoise avait remporté en 1994 lors d’une exposition tenue à Paris, pour la qualité de ses cretons français. Ce cadre était demeuré dans l’usine après la vente à Schenider’s puis à Maple Leaf, mais il revenait d’office que ce prix soit remis à la famille Roy, selon M. Morin. Mme Rodrigue-Roy ainsi que ses fils Jean-Guy et Eddy, qui étaient également présents, ont démontré leur fierté de voir l’usine être de nouveau la propriété de gens de Saint-Anselme et de Bellechasse.