50 ans après sa construction, le C-Gaby revient à Lac-Etchemin
AVIATION. Il y a un peu plus de 50 ans, Gabriel Bégin de Lac-Etchemin, que tout le monde connaissait sous le prénom de Gaby, rêvait de piloter son avion, ayant même construit son propre modèle, un Thorpe T-18 deux places, dans le sous-sol de sa résidence voisine du Garage Florent Bégin, dont il était propriétaire.
Des problèmes de haute pression puis cardiaques, qui l’ont finalement emporté à l’âge de 51 ans, l’ont empêché de piloter son avion, le C-Gaby, qu’il a dû vendre à regret peu avant son décès.
Un demi-siècle plus tard, quelques membres de la famille Bégin, soit ses filles Hélène et Sylvie, les fils de cette dernière, Antoine et Félix Trudel, ainsi que Claude Poulin, conjoint de Sylvie, ont eu droit à un moment unique qui restera gravé dans leur mémoire le reste de leur vie : le retour du C-Gaby, maintenant propriété de l’Ontarien Dick Wolff, qui s’est posé sur la piste gazonnée de l’autodrome de Lac-Etchemin le lundi 2 octobre en milieu d’après-midi.
Ce retour de « l’avion prodigue », comme on pourrait l’appeler, a été le fruit de démarches menées par Sylvie et, surtout, de son fils Antoine qui avait réussi à retracer l’existence de l’avion il y a près de trois ans.
« J’avais toujours dit à mes fils qu’un jour, quand j’allais avoir 60 ans ou que j’allais prendre ma retraite, je ferais des recherches afin de voir si l’avion était toujours en fonction puis aller le voir, ainsi que son propriétaire, si c’était le cas », racontait Sylvie Bégin lors du passage de M. Wolff et de l’avion le 2 octobre.
« Nous avions un verre arborant une reproduction du modèle Thorpe T-18 et j’ai fait quelques recherches avant de revenir à la charge quelques mois plus tard. Après des recherches sur Google et autres moteurs de recherche, je suis allé sur You Tube où j’ai découvert un modèle rouge vif d’un Thorpe T-18 qui me semblait intéressant. En cliquant sur le lien, j’ai tout de suite vu qu’il s’agissait du C-Gaby. J’étais sans mots à ce moment », indique Antoine qui s’est empressé d’envoyer le lien de la vidéo à sa mère.
« Quand j’ai reçu la vidéo d’Antoine, qui ne m’avait jamais parlé de ses recherches, j’ai regardé cela dans mon auto en arrivant et quand j’ai vu l’inscription C-Gaby à la fin de la vidéo, j’ai pleuré (de joie) pendant plusieurs minutes. On a su qu’un certain Dick Wolff en était propriétaire et après des recherches sur Facebook, on a vu plein de photos du C-Gaby. J’étais sur les nerfs », se rappelle-t-elle en ajoutant qu’elle lui avait écrit et que cinq minutes plus tard, il lui répondait, lui mentionnant qu’il était heureux d’en connaître davantage sur l’histoire du C-Gaby, l’avion n’ayant jamais changé de nom au fil de ces 50 ans.
Une première rencontre entre Sylvie Bégin et M. Wolff a eu lieu il y a deux ans chez ce dernier à Concordant, près du Lac Huron en Ontario. Lors de ce séjour, Mme Bégin a eu l’occasion d’effectuer son premier vol dans le C-Gaby, une expérience qu’elle n’est pas prête d’oublier.
« Bruno et moi sommes allés souper avec lui et le lendemain, comme il faisait beau, il m’a dit que j’allais voler dans le C-Gaby avec lui et j’étais tellement contente. Nous avons survolé la péninsule de Bruce, près du lac Huron et il m’a même permis de le piloter, avec son assistance. C’était tellement capotant », raconte-t-elle en ajoutant qu’une belle amitié est née entre la famille Bégin et M. Wolff qui, dès le premier contact entre eux, avait envisagé la possibilité de venir à Lac-Etchemin avec son avion.
« Cela faisait trois ans que je voulais venir ici. Quand j’ai rencontré Sylvie pour la première fois, c’était dans mon esprit. L’an dernier, j’étais supposé venir, mais la météo ne collaborait pas, alors j’ai remis à cette année. Il n’y avait pas d’excuses, car la température est tellement belle », précise le principal intéressé qui reconnaissait avoir été nerveux avant son départ. En tout, son vol a duré trois heures et demie, incluant une escale à Joliette pour faire le plein. Après avoir passé la nuit chez ses hôtes, il est reparti le lendemain pour la maison.
La petite histoire du C-Gaby
Élaine et Sylvie Bégin rappellent que beaucoup de gens avaient connaissance de la construction de cet avion par leur père Gabriel il y a plus de 50 ans. Une fois la construction terminée, moins les ailes qui n’avaient pas été apposées, M. Bégin a dû faire creuser une entrée vers la cave de la maison familiale pour le sortir de là.
« Notre père a apporté l’avion dans un hangar à Saint-Georges pour poser les ailes. C’est moi et François qui étions dans la boîte de camion lors du transport lors duquel il avait perdu une roue », précise Élaine.
Une fois les ailes posées, quelques tests au sol ont été réalisés par M. Bégin. « Gaby était tellement nerveux qu’une fois, il a freiné trop rapidement, piquant du nez et brisant son hélice », se remémore Sylvie qui ajoute que les problèmes de santé, qui sont apparus peu après, avaient forcé leur père à vendre son avion peu avant son décès, l’appareil se retrouvant à Rimouski.
Selon ce qu’on sait, la personne en question l’a conservé une dizaine d’années, celui-ci passant la majorité de son temps dans un hangar avant d’être revendu deux autres fois par la suite, transitant par Winnipeg avant de se retrouver en Ontario.
Dick Wolff rappelle qu’avant d’acheter le C-Gaby, il avait un autre avion qui a été lourdement endommagé en raison d’un atterrissage d’urgence provoqué par une panne d’essence. Il a acheté celui-ci il y a six ans et après volé près de chez lui pendant les trois premières années lors desquelles il a procédé à diverses réparations sur l’appareil, il souligne que celui est en excellente condition.
Il dit apprécier grandement cette belle amitié qui s’est formée dès le premier jour avec Sylvie et le reste de la famille Bégin. « Tout cela grâce à Antoine », a-t-il rappelé en ajoutant que cela l’avait aidé à compléter en bonne partie l’histoire de l’avion qu’il entend un jour publier dans le magazine de l’Association canadienne des propriétaires et pilotes d’avion.