Nouvelle porte pour les personnes en détresse
SANTÉ. La santé mentale a fait couler beaucoup d’encre dans les médias ces derniers temps, notamment à la suite des tragédies de Laval et d’Amqui, où deux chauffeurs ont, respectivement, foncé volontairement avec un camion-bélier dans une garderie, faisant deux enfants morts et six blessés, et l’autre, sur des piétons, faisant trois morts et huit blessés.
Jusqu’à quel point les intervenants peuvent-ils prévenir et voir les signes avant-coureurs d’actes mettant en danger des personnes ? Pour y arriver, la santé mentale se divise et regroupe plusieurs professions qui travaillent en concertation dans les domaines biologique, psychologique et social. Peu importe qu’on soit dans une grande ville ou en région, ces spécialistes sont-ils outillés pour accompagner une personne en crise psychologique portant atteinte à leur intégrité ?
Beaucoup de questionnements se sont focalisés autour des situations de crise : le chauffeur était-il en crise psychotique et que peut-on faire pour que ces drames n’arrivent plus ?
« On estime et gère un risque. On a des outils pour évaluer les risques, mais ceux-ci ne détiennent pas la vérité. On offre un service adapté à une situation survenue à un moment donné. On est tributaire d’un élément déclencheur qui peut arriver deux jours plus tard. Un autre élément déclencheur a pu désorganiser la personne en crise et celle-ci a posé un acte. On n’a pas pu l’évaluer ni le prévoir. On n’est pas à l’abri d’autres éléments déclencheurs qui provoquent de tels gestes », explique Michel Laroche, directeur des programmes santé mentale et dépendance au Centre intégré de santé et de services sociaux de Chaudière-Appalaches (CISSS-CA).
« Il y a le service Urgence-Détresse où une personne en crise peut appeler la Centrale infosociale 811, option 2 (mise sur pied en 2022, durant la pandémie). On évalue par téléphone la situation. On peut appeler la police et si la situation est préoccupante, on demande à un intervenant d’aller visiter la personne sur place avec les policiers pour une intervention sur le terrain afin d’évaluer les risques », dit-il.
Santé mentale à la suite d’un trauma
Dans un autre registre, en Beauce, une collision frontale est survenue récemment à Saint-Frédéric. Cet événement s’est soldé par des décès qui ont coûté la vie à trois membres d’une famille de six. Sur le plan communautaire, des proches, des amis et des agriculteurs beaucerons se relayaient pour assurer la continuité des activités de la ferme familiale du couple.
Mais une fois la tragédie passée (post-événement), il y a le retour à la réalité, il y a eu des morts et des blessés. Comment arrive-t-on à aider les survivants ? La santé mentale devient aussi préoccupante, car il y aura forcément des séquelles de différentes formes à la suite de ces traumas.
M. Laroche explique qu’avec l’aide du réseau de santé, le CLSC, l’hôpital, les organismes communautaires – pour notamment l’hébergement dans des situations de crise (itinérance, perte d’emploi, divorce, violence conjugale, etc.) – et la police sont des filets de sécurité importants auprès de la clientèle qui vit une situation de crise.
« Le défi est d’évaluer si cette personne est un danger pour elle-même ou pour les autres. Il faut qu’elle nous ouvre sa porte pour qu’on puisse l’orienter vers nos services », explique M. Laroche.
Si la personne refuse les services, l’application de la loi de la protection de la personne (P38) autorise les intervenants et policiers à emmener la personne à l’hôpital pour une évaluation psychiatrique dans le cadre d’une garde préventive.
« Si la personne a un réel besoin de soins en psychiatrie et qu’elle refuse ces soins, une garde provisoire est demandée au tribunal – auprès d’un juge – pour garder cette personne plus longtemps à l’hôpital. On a à faire la démonstration que cette période d’hospitalisation est nécessaire considérant l’état de la personne », mentionne-t-il.
Dans le réseau de la santé, « peu importe le drame, on va au-devant des gens, on offre des services et du soutien. Les intervenants se déplacent pour assurer un suivi (post événementiel). On n’attend pas que les gens, déjà fragilisés par l’événement, viennent vers nous. On se manifeste auprès des gens touchés de près », mentionne M. Laroche.