Élevage biologique des abeilles: un programme de recherche unique est lancé
APICULTURE. L’apicultrice Claude Dufour et un autre producteur de miel biologique québécois prendront part, au cours des deux prochaines années, à un programme de recherche mené par le Centre de recherche en santé animale de Deschambault, le CRECAD.
« On veut savoir ce que ça donnerait, en régie biologique d’abeilles, de nourrir celles-ci avec du miel l’hiver. C’est un gros débat actuellement, car il y a un seul producteur biologique qui le fait actuellement au Québec », indique Mme Dufour.
« Les abeilles ne mourront jamais de froid l’hiver, mais de faim. Si elles ont de la nourriture, elles vont passer au travers. La partie la plus critique demeure la fin de l’hiver, car si on ne peut pas les nourrir au printemps, on va les perdre », poursuit-elle en ajoutant que la norme bio obligera les producteurs bio comme elle à nourrir exclusivement leurs abeilles exclusivement avec du miel l’hiver, et ce, d’ici 2025.
« On assiste à une levée de boucliers des producteurs bio actuellement, car on a craint de faire mourir toutes nos colonies si, du jour au lendemain, on doit tous les nourrir uniquement au miel », soutient-elle en ajoutant que le miel contient des minéraux qui, pour des abeilles qui sont prises dans un environnement fermé pendant cinq mois, augmentent l’activité intestinale.
« C’est comme avoir la diarrhée et ne pas pouvoir aller aux toilettes. On les nourrit au sirop de sucre blanc, ce qui représente de l’énergie pure. On ne leur donne pas d’éléments de soins alimentaires », précise Mme Dufour.
L’apicultrice rappelle que l’abeille se nourrit normalement de miel, mais comme elle vient du Moyen-Orient où elle n’est pas prise dans une ruche pendant cinq mois, c’est plus difficile de les nourrir au miel ici l’hiver.
« En leur donnant les minéraux que l’on retrouve dans le miel, elles vont déféquer dans la ruche et ce sera la catastrophe. Si elles commencent à faire cela, c’est pratiquement la fin de la ruche. C’est pourquoi tout le monde nourrit ses abeilles au sirop de sucre blanc, sauf un qui réussit. Cela fait 46 ans qu’il fait cela. C’est possible que la génétique de ses abeilles se soit modifiée avec le temps. »
Étude sur trois ans
Claude Dufour possède actuellement 60 colonies d’abeilles et sa participation à cette étude l’obligera à doubler sa production à ce niveau. Elle souligne que lors de l’étude, qui durera deux ans, elle et l’autre producteur biologique impliqué devront implanter trois types de « nourrissage », selon les colonies.
Un groupe sera nourri uniquement sucre, comme c’est le cas actuellement, un autre avec un mélange de miel et sucre, puis un dernier au miel uniquement.
« Pour faire cela, je devrai ajouter 30 colonies supplémentaires cette année et 30 autres l’an prochain. Ce sont ces nouvelles colonies qui vont faire partie du programme de recherche qui se déroulera sur trois ans », précise-t-elle en mentionnant que le protocole de recherche est en préparation et que celui-ci sera mis en application en 2023 et 2024. Les résultats seront connus en 2025.
« On espère nourrir nous abeilles uniquement au miel, ce serait plus simple, mais si la norme bio nous l’exige et que les résultats sont négatifs, je ne sais pas comment celle-ci va s’adapter. »