Des quantités impressionnantes de bleuets 

AGRICULTURE.  Les bleuetières, en Chaudière-Appalaches, connaissent une saison record en matière de quantité fruitière. L’offre étant toutefois plus forte que la demande, plusieurs de ces bleuets demeureront dans les champs. 

Ces fortes quantités, une situation touchant l’ensemble du Québec, s’expliquent par des conditions météorologiques optimales. L’hiver clément, le printemps hâtif, ainsi que les fortes chaleurs en juin, ont devancé la saison d’au moins dix jours.

« Le fruit sur nos plants se forme l’automne précédent. Beaucoup plus de plants ont passé l’hiver. Les risques de gels pendant la nuit, au printemps, ne se sont pas produits. Dès les vacances de la construction, nous faisions la cueillette », dit Jean-Yves Goulet, président du Regroupement des bleuetières de la Chaudière-Appalaches (RBCA), et propriétaire de la Bleuetière Goulet à Saint-Frédéric.

Qu’importe l’année, la saison des bleuets s’étend de quatre à six semaines. Au moment de l’entrevue avec M. Goulet (mercredi 14 août), ce dernier confirmait que la saison 2024 s’achevait dans l’ensemble des bleuetières du RBCA. 

« En 25 ans dans le milieu, je n’avais jamais vu des champs aussi chargés. L’autocueillette demeure à la même hauteur que les saisons précédentes. Durant la COVID, beaucoup de gens ont découvert cette activité et reviennent faire des cueillettes », confirme Jean-Yves Goulet.

Dumping étranger

Les quantités abondantes de bleuets ne se limitent pas au Québec. Des producteurs de la Colombie-Britannique et du Michigan, aux prises avec la même situation, écoulent leurs productions dans nos épiceries à des prix moindres. Selon M. Goulet, cette situation appelée dumping existait déjà lors des saisons normales. 

« Leurs plants, de style pommier, sont formés par un ou deux troncs. Ces bleuets se ramassent mécaniquement. Chez nous, ces plants varient de dix à quinze troncs. Il n’existe aucune machine pour ça (cueillette). On doit ramasser les bleuets à la main et ça occasionne des frais supplémentaires », mentionne le producteur beauceron. 

Par la bande, les épiciers et grossistes achètent davantage les bleuets étrangers afin de sauver des coûts. En y ajoutant les travers du contexte économique actuel, le consommateur fait face à des choix difficiles. C’est pourquoi les bleuetières d’ici laisseront beaucoup de fruits dans leurs champs. 

« Le bleuet demeure un produit de luxe. Laisser nos fruits dans les champs, ça nuit au chiffre d’affaires. C’est pour cela qu’on doit miser sur l’achat local, la fraîcheur et la culture responsable. Le bleuet est également un fruit se conservant facilement sous plusieurs formes », précise M. Goulet, ajoutant que le goût d’un fruit local reste meilleur par la proximité entre le champ et le consommateur.

Il aimerait que chaque région québécoise possède un regroupement comme la RBCA. « Ça prend une concertation provinciale, comme on le voit dans d’autres productions agricoles, pour favoriser la mise en marché. Par exemple, on pourrait vendre des bleuets de la Montérégie en Chaudière-Appalaches, car leur saison commence plus tôt. Quand leur saison est finie, leurs épiceries vendraient des bleuets de Chaudière-Appalaches », d’expliquer Jean-Yves Goulet. 

Les principaux épiciers canadiens (Loblaw, Metro, Empire, Walmart, Costco) adhéreront justement à un code de conduite dès l’an prochain, sous la pression du gouvernement canadien. « Cette solution nous aidera à mieux planifier où l’on s’en va avec nos commandes », conclut M. Goulet.