Le parcours héroïque d’un militaire beauceron

JOUR DU SOUVENIR. Il y a 85 ans éclata la Deuxième Guerre mondiale. On se la remémore le 11 novembre pour ne plus qu’elle se reproduise. 

La majorité des vétérans qui l’ont connue sont maintenant décédés. Parmi ceux-ci, il y a eu des parcours héroïques rapportés dans les livres et sur grand écran, tandis que d’autres histoires aussi nobles les unes que les autres gagneraient à être connues, comme celles du caporal Victor Deblois, de Saint-Georges. 

Malgré les atrocités qui se sont vécues outremer, plusieurs des valeureux militaires sont revenus chez eux le cœur chamboulé et la bouche cousue, ne souhaitant pas raviver leurs douloureux souvenirs. C’est souvent après leur mort que leur famille décide de perpétuer leur mémoire.

« Mon père, c’était mon héros. Il avait en lui un fond disciplinaire qu’il a gardé. Il disait toujours ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas qu’ils vous fassent et si tu veux être écouté, apprends d’abord à écouter », se souvient Carol Deblois, les yeux émus. Il a accepté de partager, avec la représentante du journal, des bribes d’histoires de la courte, mais trépidante vie militaire de son père. Celui-ci l’évoquait qu’à de rares occasions. 

« Il n’en parlait pas beaucoup… Il disait que s’il s’est battu, c’est pour que nous ne vivions jamais les mêmes horreurs », explique M. Deblois.

Une dague allemande 

« Il y avait une dague allemande accrochée au mur de notre cuisine. Lors de la guerre, mon père s’est battu avec un nazi. L’un des deux devait mourir et c’est mon père qui a pris la dague des mains de l’Allemand pour le tuer. Mon père l’a conservée », raconte M. Deblois. « Ma mère avait peur que ses enfants jouent et se blessent avec la dague, alors mon père l’a donnée au Musée Le Régiment de la Chaudière, à Lévis. »

Victor Deblois est né le 12 octobre 1918, après la Première Guerre mondiale. 

Par esprit d’aventure, âgé de 21 ans, il s’est enrôlé volontairement dans la 3e Division d’infanterie de l’Armée canadienne, en 1939. D’abord parti en Europe pour suivre un entraînement, il est revenu un an au pays pour entraîner d’autres soldats. Tout ça pour le fameux débarquement en Normandie. « Et, avant de retourner à la guerre, il a épousé ma mère, Charlotte Caron, avec qui il a eu six enfants », souligne M. Deblois.

Le jeune militaire a été blessé à trois reprises par des obus tirés par les Allemands. Il a eu notamment une blessure à la tête et une autre à la jambe. Carol Deblois a conservé le casque transpercé d’un obus qui aurait pu tuer son père.

« Lorsque mon père est tombé dans le fond d’une tranchée, il a cru que c’était fini pour lui. Il a été blessé à la tête et a gardé des séquelles à un œil. Lorsqu’il est sorti de l’hôpital, là-bas, il a dit que les Allemands ne l’avaient pas eu, alors il est reparti au combat », ajoute-t-il.

Quelques décennies après la guerre, M. Deblois est retourné, avec son épouse, en Normandie lors d’un voyage organisé. Une femme l’a reconnu et s’est approchée de lui pour l’interpeller. 

« Vous ne vous souvenez pas de moi, mais moi, si. Je suis la petite fille qui était cachée avec sa mère au sous-sol d’une maison tombée sous le joug des nazis. Et c’est vous qui nous aviez libérées. » 

Une photo qui a fait le tour du monde

Il existe une célèbre photo du caporal Victor Deblois braquant une arme vers deux  prisonniers allemands, capturés par des soldats canadiens, sur la plage Juno, le jour J. Aujourd’hui, la photo est accrochée au mur de la maison des Canadiens, à Bernières-sur-Mer, en Normandie.

Au retour de la guerre, Victor Deblois a reçu plusieurs médailles de bravoure. Il est devenu chef de police du secteur ouest à Saint-Georges, de 1946 à 1957 et, par la suite, charpentier. Il est décédé le 9 janvier 1989, à l’âge de 70 ans.