Anxiété: le mécanisme d’action du LSD s’apparente à celui du Prozac
MONTRÉAL — La manière dont de faibles doses de LSD combattent les symptômes de l’anxiété s’apparente à celle de certaines classes d’antidépresseurs et d’anxiolytiques fréquemment prescrits, démontrent les travaux d’une chercheuse montréalaise.
Si on savait déjà que des microdoses d’acide lysergique diéthylamide (LSD) jumelées à une psychothérapie pouvaient soulager les symptômes anxieux et dépressifs des patients atteints de graves problèmes psychiatriques ou neurologiques, les mécanismes neurobiologiques responsables de cet effet bénéfique étaient mal compris.
«Nous avons essayé de comprendre quel est le mécanisme d’action du LSD et dans quelles maladies mentales il pourrait être utilisé», a dit la docteure Gabriella Gobi, la scientifique principale du Programme en réparation du cerveau et en neurosciences intégratives à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill
La docteure Gobbi et ses collègues ont constaté que le LSD enclenche des mécanismes qui ressemblent à ceux des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (Prozac, Zoloft, Celexa, Cipralex, etc.)
Des études précédentes avaient démontré qu’un stress prolongé réduisait l’activité des neurones qui transmettent la sérotonine. Les chercheurs ont maintenant découvert que le LSD favorise la transmission nerveuse de la sérotonine, un neurotransmetteur qui joue un rôle crucial dans le sentiment de bien-être, un peu comme le font les ISRS mieux connus.
Des expériences menées auprès de souris ont également montré aux chercheurs que le LSD peut aider à reconstruire les branches des neurones qui transmettent le signal électrique au corps de la cellule nerveuse, et qui sont souvent abîmées par le stress.
«On a vu que les animaux qui prenaient du LSD n’avaient pas de symptômes d’anxiété, donc que le LSD pouvait prévenir l’anxiété provoquée par le stress à travers un mécanisme sur le système de la sérotonine», a expliqué la docteure Gobbi, qui étudie les substances psychédéliques depuis de nombreuses années.
D’autres études seront maintenant nécessaires pour vérifier si le LSD pourrait avoir la même utilité chez les humains.
Et même si les substances psychédéliques sont utilisées à des fins récréatives depuis très longtemps, ce sont des produits qu’on ne doit pas prendre à la légère, a prévenu la docteure Gobbi.
«Il faut faire attention. On sait que de faibles doses, pour de courtes périodes, peuvent être utilisées, par exemple, dans la dépression résistante, dans l’anxiété, dans le stress post-traumatique…, a-t-elle dit. Il faut absolument avoir l’aide d’un thérapeute, d’un psychothérapeute ou d’un médecin. Ce sont des substances dissociatives qui (…) doivent toujours être administrées sous la direction d’un médecin ou d’un thérapeute.»
De plus, seul un petit groupe de patients souffrant de problèmes d’anxiété et de stress pourrait profiter de la prise de substances psychédéliques, ajoute-t-elle. Des études cliniques se poursuivent pour y voir un peu plus clair et on doit attendre leurs résultats avant d’envisager de les prescrire à plus de patients, a dit la docteure Gobbi.
La prochaine étape pour l’équipe de la docteure Gobbi sera d’évaluer les mécanismes d’actions d’autres substances psychédéliques, comme la psilocybine (le composant actif des champignons magiques) et la kétamine.
Les conclusions de cette étude sont publiées par le journal Neuropsychopharmacology. Les travaux ont été menés en collaboration avec des chercheurs en psychiatrie de l’Université McGill, ainsi qu’avec des chercheurs en neurosciences de l’Université Vita Salute San Raffaele et en sciences pharmaceutiques et pharmacologiques de l’Université de Padoue, en Italie.